Les moulins à vent
Avant que le moulin à vent ne soit conçu, l’écrasement des graines était obtenu à l’aide de pilons ou de mortiers que, seule, la force humaine pouvait activer. Son apparition sera donc un progrès énorme et il est connu de longue date puisque des textes de l’Islam parlent de lui au VII° siècle déjà. Sa conception est alors totalement différente de celle que nous connaissons aujourd’hui. S’il est bien constitué d’une tour, celle-ci en revanche n’est point équipée d’ailes. Elle est, en fait, percée de meurtrières dans lesquelles s’engouffre le vent. Ces étranglements augmentent la vitesse de celui-ci qui vient ainsi frapper avec d’autant plus de force les aubes d’une roue à palettes. Cette dernière placée horizontalement a donc son axe vertical qui entraîne en partie basse la meule dévolue à l’écrasement des grains.
Plus proche de nous, le moulin sur pivot, tout en bois, est connu en France dès le XIII° (un texte anglo-saxon atteste sa présence en Europe dès 833). Mais c’est surtout à partir du XV° que les moulins à vent, tels que l’on peut les revoir encore parfois, dits "moulins à tour" se sont répandus dans notre région. A la fin du siècle dernier, les six départements de l’ouest regroupaient le tiers des moulins à vent de tout notre pays.
L’architecture de ces moulins est assez semblable : une solide construction de pierre, bien ancrée sur un site assez élevé et surmontée d’une toiture conique, pivotante qui supporte les ailes de façon à pouvoir s’orienter en fonction de la direction des vents et bénéficier ainsi au mieux du maximum de leur puissance.
Durant cinq siècles, ces constructions ont subsisté sur notre sol pour être finalement détrônées par la machine à vapeur. Les fariniers ont ainsi fait place aux minotiers et les ailes des moulins, figées aux sommets des coteaux, se sont lentement effondrées, emportées par le vent, celui-là même qui leur avait insufflé si longtemps la vie.
L’ingéniosité de l’homme lui a permis au fil des ans de lui permettre de domestiquer la force du vent pour subvenir à toutes les fonctions d’un moulin qu’il s’agisse de moudre les graines ou qu’il s’agisse des servitudes qui en découlent comme par exemple monter aux étages supérieurs les sacs de ces graines.
Deux grandes catégories de moulins se distinguent :
* Le moulin-pivot : Il est monté sur un axe vertical et c’est le moulin dans sa totalité qui est orienté pour présenter les ailes de manière optimum par rapport à la direction du vent. Ce moulin, très rare dans notre région et inexistant sur notre commune, ne sera pas développé dans ces pages.
* Le moulin-tour : C’est lui que nous trouvons dans notre localité. Ce moulin est beaucoup plus trapu. Il est fixe et son assise est donc réalisée en maçonnerie. C’est la toiture qui supporte les ailes, c’est donc elle, et elle seulement, qui s’oriente en fonction de la direction des vents.
Dans les deux cas, l’orientation se faisait à l’aide d’une queue de mise au vent. Cette orientation s’est faite à l’origine par la seule force du meunier, puis par la force animale (on attelait un âne à cet accessoire), et enfin par la force mécanique (à l’aide de palans, de treuils etc.). Sur les derniers moulins, des systèmes mécaniques internes permettaient cette orientation.
Le vent entraînait donc les ailes ; celles-ci fixées sur un axe incliné de 12 à 15 ° par rapport à l’horizontale transmettaient le mouvement à la pignonnerie qui se trouvait derrière. A l’origine, ces ailes constituées de deux poutres croisées ( appelées vergues ) étaient équipées de voiles que le meunier devait installer et ... surveiller car suivant la violence des courants aériens, cette voilure devait évoluer. C’est au cours du XIX° siècle qu’un homme, Berton, conçut un nouveau mode de prise au vent. Ce procédé ne faisait plus appel à des voiles mais ... à des planches. Celles-ci montées sur les ailes avaient la faculté de se déployer ou au contraire de se rétracter à la demande. Ainsi le meunier, de l’intérieur de son moulin et sans arrêter celui-ci pouvait en fonction des vents jouer sur la « voilure ».
Un système interne de différentiel ( Vue 1 ) permettait de jouer sur la couronne extérieure ( Vue 2 ). Cette dernière par l’intermédiaire de tringleries appelées vergettes faisait se déployer à la demande les lames sur la vergue ( Vue 3 ).
Ce fut un progrès considérable. Ainsi une voilure composée de 10 lames de 20 cm de largeur pouvait atteindre 2 mètres de largeur et se rétracter jusqu’à n’offrir au vent qu’une seule lame soit 20 cm de largeur, ces lames venant se recouvrir les unes les autres.
Vue - 1. Différentiel de commande de la voilure ( situé sur l’axe « horizontal » )
Vue - 2. Couronne extérieure
Vue - 3. Schéma de transmission de commande de la couronne aux lames
Ailes et axe tournaient donc. Leur mouvement était transmis à angle (presque) droit à un autre axe, vertical celui-ci, par le biais d’une grande roue dentée qui engrenait avec un petit pignon augmentant ainsi la vitesse de rotation. La vue ci-dessous représente cette transmission. Les dents des engrenages (en bois) devaient transmettre la totalité de la puissance et devaient donc être d’une grande résistance à l’usure.
Liaison entre arbre « horizontal » et arbre vertical
Pour moudre le grain, il ne restait plus qu’à fixer sous cet axe une meule tournante. Elle pouvait être entraînée soit directement par l’arbre soit par un jeu d’engrenages intermédiaires lui donnant ainsi une vitesse différente et transmettant en outre la puissance du moulin à un certain nombre d’organes annexes. Celle meule tournante effectuait son mouvement de rotation au-dessus d’une autre meule dite dormante, et donc fixe cette fois-ci. Le grain arrivait par le biais d’une trémie en partie centrale de la meule tournante, se glissait entre les deux et était ainsi broyé. Cette dernière opération était « contrôlée » par le biais d’un régulateur à boules qui agissait sur l’écartement des meules à l’aide d’une tringlerie spéciale en fonction de la vitesse de rotation
Introduction des graines entre les meules
Les meules devaient avoir une configuration spéciale qui permettait l’introduction de la graine et l’évacuation de la farine sur les bords par effet de force centrifuge. Là, intervenait le « rhabilleur de meules ». C’était tout un art, soulever la meule supérieure n’était déjà pas une chose aisée mais travailler sous elle pour redonner à la meule inférieure toute ses aspérités était encore plus pénible. L’usure avait provoqué une surface de contact trop importante entre les deux meules. Par marquage avec un produit colorant, on déterminait les surfaces qui devaient être reprises. Celles-ci étaient travaillées par martelage. Mais la surface obtenue - devenue à son tour trop grossière - devait être adoucie pour rester dans des valeurs correctes car trop de rugosité aurait permis aux graines de rester entre les aspérités et aurait diminué le rendement des meules.
La farine, une fois obtenue était dirigée vers une blutterie. C’est là que s’effectue la séparation de la farine, du gruau et du son. Il ne restera plus qu’à la conditionner en sacs pour être ensuite livrée.
De la fonction de meunier :
Autrefois, chaque foyer faisait lui-même son pain. L’approvisionnement en farine était donc une chose essentielle et le meunier qui avait la charge de cette production était donc un personnage important car, si aujourd’hui la part du pain dans l’alimentation a beaucoup diminué, autrefois ce produit était à la base de toute nourriture dans nos régions. Le meunier pyait ses services en retenant à son profit une partie de la rcéolte qui lui était apportée. Cette part était souvent voisine de 10% du poids apporté à moudre. Cette pratique a souvent provoqué certaines réticences de la part de ceux qui portaient leur blé, estimant que le meunier avait souvent une fâcheuse tendance à aller au-delà de cette quote-part.
La fonction de meunier comprenait toutes les actions nécessaires depuis la collecte des sacs de blé jusqu’à la livraison de ceux de farine. Mais le gros de son activité se concentrait autour du fonctionnement de son moulin. Il ne faut surtout oublier qu’ il était d’abord tributaire des vents et que ses horaires étaient donc imprévisibles. Si le vent soufflait, la journée de travail avait une fâcheuse tendance à s’éterniser, voire atteindre les 24 heures et elle devenait particulièrement pénible. Pour l’aider dans sa tâche il avait donc recours lorsqu’il le pouvait aux membres de sa famille ( parents, enfants etc. ). Sinon, il devait s’assurer le concours d’un aide ... qu’il devait rémunérer.
Pour mettre son installation en fonction, il devait d’abord orienter son moulin et déployer sa voilure. En fonction de la violence, des vents il développait plus ou moins celle-ci mais cela ne le dispensait pas de contrôler en permanence la rotation des meules et d’agir en conséquence sur un frein. Un autre de ses gros soucis consistait à surveiller constamment la qualité de son produit fini : la farine. Il devait donc veiller à la régularité de la finesse de celle-ci, il devait juger sa blancheur, argument de plus-value, de sa consistance, de son moelleux, de sa bonne séparation dans la blutterie des produits secondaires : gruau et son.. Cela ne le dispensait absolument pas de surveiller l’ensemble de son moulin, huiler certaines parties, surveiller les échauffements intempestifs, contrôler les usures qui pouvaient se manifester, effectuer toites les tâches annexes de son activité : transfert des sacs de blé en partie supérieure du moulin, déversement de la matière première dans la trémie etc.
Moulin de la Rochelle - Peinture d’Edmond Bertreux
Inventaire :
St Jean de Boiseau est peu élevé (environ une vingtaine de mètres au-dessus du niveau de la mer) mais il se trouve dans un paysage malgré tout légèrement vallonné. Cette configuration présente ainsi de nombreux points légèrement surélevés par rapport à la campagne environnante. Il n’en fallait pas plus pour que plusieurs moulins viennent naturellement s’implanter sur les lieux. C’est ainsi que pas moins de 13 sont venus agrémenter le paysage pour le plaisir des promeneurs d’aujourd’hui.
7 sur notre commune actuelle :
* Le moulin du Cormier Roux ou moulin des Charreaux
* Le moulin de la Rochelle
* Le moulin du Pé
* Le moulin Thabard ou moulin Hardy
* Le moulin Rothard
* Le moulin de la Roche de Gré
* Le moulin Bouillard
6 sur le territoire de La Montagne qui, jusqu’en 1877, faisait partie de notre commune
* Le moulin de Launay
* Le moulin du Fresne
* Le moulin Ramonet
* Le moulin de la Roseraie
* Le moulin Cassis
* Le moulin Gassais
Pour mémoire, un quatorzième moulin, à quelques centaines de mètres de notre localité était érigé sur l’île d’Indret. Au milieu du siècle dernier, Jean Violin, boulanger et dernier maire de St Jean de Boiseau avant la scission d’avec La Montagne, s’y approvisionnait en farine pour confectionner son pain.
Revue de détail : Saint Jean de Boiseau
Moulin du Cormier Roux ou moulin des Charreaux :
Situé sur la Haute-Perche, il fut restauré en 1907 et cessa de fonctionner au départ du meunier à la guerre de 1914. Démoli partiellement en 1940 par le propriétaire, sa charpente fut récupérée pour servir de ... bois de chauffage.
Ce moulin avait la particularité d’être de hauteur réduite, si bien que les ailes touchaient presque le sol pendant leur rotation. Un enfant de Boiseau, s’étant approché trop près pendant son fonctionnement, avait été atteint à la tête. Il n’en mourut pas mais il perdit la raison.
A la fin de sa carrière, le moulin fut mécanisé ; une chaudière fournissait la vapeur pour en assurer le fonctionnement, ce qui a prolongé son existence de 3 ou 4 ans seulement.
Moulin de la Rochelle :
Ce moulin porte la date de 1699 sur le palâtre de granit de son entrée. A l’intérieur de ce moulin se trouve une seconde date gravée (1828), il s’agit vraisemblablement d’une restauration. En 1804 c’est un Jonet qui exploite le moulin, sa situation financière est suffisamment critique pour qu’il soit obligé de vendre la moitié de son moulin et de ses dépendances le 18 fructidor An XII (5 septembre 1804). En 1862, ce moulin était le seul dans la région à posséder encore des voiles. Son propriétaire Auguste Courgeon qui avait une nombreuse famille (10 enfants) dut se résoudre à le revendre. Ce fut Henri Jean Legendre qui l’acheta vers 1872. En 1876, il décéda après avoir légué tous ses biens à sa mère et à sa soeur Marguerite. Cette dernière épousa quelques semaines plus tard Henri Bézias, elle mourut en 1939 à l’âge de 94 ans (c’est elle qui se trouve sur le tableau figurant en tête de cette page).
En 1889, une bourrasque avait enlevé la toiture et les ailes qui s’étaient abattues dans les champs voisins. Ruiné, Henri Bézias se fit roulier puis commissionnaire.
Moulin du Pé :
Il était situé à l’extrémité de l’allée qui reliait le château au village de la Noë des Rivières et appartenait à la seigneurie du Pé. En 1665, on relève comme exploitant Simon Guillet. Le dernier connu est un François Landais en 1793. Avant la Révolution, les vassaux avaient obligation de moudre leur blé dans le moulin du seigneur local, celui-ci en retirait une rente. A St Jean, de nombreux réfractaires, jugeant la redevance trop forte faisaient moudre leur blé ailleurs, ce qui n’était pas du goût notamment de Jean de Martel (1634-1709), propriétaire du Pé. Il intenta donc de nombreux procès pour que son droit lui fut restitué. Ainsi en 1665, soixante-douze contrevenants furent poursuivis pour ce motif.
Moulin Thabard ou moulin Hardy :
Situé à la Télindière, il est encore en très bon état de conservation. Il fut construit en 1710 (date inscrite sur une pierre de granit) et brûlé le 10 septembre 1793 sur les ordres de Beysser. Vers 1907, il est restauré et les ailes sont déposées.
A noter que Jean Legendre qui a acheté le moulin de la Rochelle exerçait auparavant ses talents de meunier en ces lieux.
Moulin Rothard :
Celui que nous voyons encore aujourd’hui n’est pas le moulin d’origine. Plusieurs démolitions ont contribué à le rendre complètement différent du premier édifié puisque les traces les plus anciennes remontent à ... 1493, il s’appelait alors le "Moulin vieil".
L’actuel moulin, parfaitement restauré, aurait été construit en 1675 et dépendait d’une châtellenie sise sur la commune de Brains. Par exception, le seigneur Charette de Briord de Port St Père avait autorisé certains habitants de Brains à faire moudre leur blé en ce moulin. Cette faculté avait été attribuée par le fait que ces habitants devaient franchir le Tenu (actuelle Acheneau) pour aller sur Port St Père.
Il fut, lui aussi, brûlé pendant la Révolution. Les fariniers qui avaient pris part à l’insurrection furent capturés, emprisonnés au château d’Aux et fusillés comme rebelles en 1794. L’année suivante, une somme de 6 000 livres fut attribuée à la veuve du propriétaire pour réédifier le moulin.
Il cessa de fonctionner en 1925 et tomba ensuite en ruines par manque de moyens financiers. Par la suite, il put être restauré au fil des ans et l’adjonction en 1983 d’ailes lui redonna un air de jouvence.
Moulin de la Roche de Gré :
Construit par Grollier au lieu-dit La Béhinière vers 1870, à la fin de la belle époque des moulins à vent, il se distinguait par sa tour très haute (13 mètres). Il a cessé tout service à la fin de la guerre 1914-1918.
En fin de carrière, il a été équipé d’une locomobile au charbon qui actionnait le mécanisme permettant ainsi au meunier de travailler même sans vent.
Au retour de la guerre, le meunier abandonna le métier, il fit alors tomber les ailes. Plus de soixante après, une tempête enleva la toiture.
Aujourd’hui encore, il se dresse fièrement en bordure de la nationale 23 avec en fond de décor les restes du moulin Bouillard
Moulin Bouillard :
Construit dans les mêmes années que le moulin de la Roche de Gré, au sud du Surchaud où habitait le propriétaire Pierre Bouillard, le moulin Bouillard tournait encore en 1927. Il fut abandonné au caprice de la pluie et des vents entre les deux guerres.
Pour éviter tout risque d’accident, on attela une paire de boeufs sur la toiture et sur les ailes afin de lui ôter la tête. Depuis la tour s’effrite lentement au milieu des vignes et des champs.
La Montagne
Le moulin de Launay :
Le moulin du Fresne :
Il est connu dès 1437. Son implantation n’est pas localisée avec précision mais l’on pense qu’il devait se trouver sur le même site que le moulin de la Hibaudière cité en 1749.
Le moulin Ramonet :
Il fut implanté près du lieu où sera édifiée l’église montagnarde au milieu du XIX° siècle.
Le moulin de la Roseraie :
Situé à l’angle des Rue du moulin, Rue de la Roseraie et Rue de la Garenne, il possédait encore ses ailes en 1910. Il y a peu, il ne subsistait plus que la moitié de la tour. Il vient de faire l’objet d’une restauration. Dénommé également moulin de la Garenne, il doit cette appellation au fait qu’il est situé à l’extrémité de cette rue.
Le moulin Cassis :
Il fut démoli peu après 1850 pour permettre l’élargissement de la rue d’Indret. Sa démolition fut l’objet d’une controverse qui amena la démission du maire de l’époque : Demangeat. En effet en septembre 1846, un arrêté préfectoral autorisait l’élargissement de la voie en bordure de laquelle se trouvait le moulin et le condamnait donc. Or en 1850, la veuve Chesneau propriétaire de ce moulin demande l’autorisation de le faire réparer, autorisation qui lui sera refusée par un autre décret préfectoral du 13 novembre 1850. Le 2 août 1851, le Préfet accorde soudain les réparations contrairement à son arrêté précédent et aux avis des experts techniques. Les travaux effectués, la valeur du moulin passe subitement de 500 F à 3 000 F. Ce surplus subit que dut verser la commune pour l’expropriation n’eut pas l’heur de satisfaire le maire qui donna sa démission et qui reçut à cette occasion un soutien important de la part de son conseil municipal.
Le moulin Gassais :
Il était situé à l’angle des rues de la République et de la rue d’Indret.
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