
Voyage présidentiel de M. Félix Faure en loire-Inférieure en avril 1897.
Un résumé croisé de deux journaux de la belle-Epoque : le « Populaire » et l’« Espérance du Peuple », pour une visite protocolaire en Loire-Inférieure. La fête bat son plein à Nantes dès la veille de l’arrivée de M. Félix Faure, Président de la République ; les travaux de décoration ont d’ailleurs commencé dès le 4 avril Le Président voyage dans l’ouest de la France du 20 au 26 avril 1897. Il reste une journée à Nantes avant de descendre l’estuaire de la Loire. Il s’arrête à l’arsenal d’Indret qu’il avait déjà visité en tant que Ministre de la Marine en 1894, procède à l’inauguration officielle du canal de la Martinière, participe à Frossay à un banquet (dans la tradition de la IIIème République) offert par la Chambre de Commerce de Nantes, effectue une halte à Paimboeuf avant de présider cérémonies et soirée de gala à Saint-Nazaire
Arrivée à Nantes :
M. FAURE, Président de la République, accompagné de MM. MELINE, Président du Conseil, BARTHOU, ministre de l’intérieur, LE GALL, Directeur du Cabinet, et du Général TOURNIER, est parti de Paris le 19 avril 1897 à 21 h 40. Son voyage dans l’ouest de la France, entre le 20 et le 26 avril, a au programme : la Roche sur Yon, Nantes, la descente de la Loire et Saint-Nazaire, les Sables-d’Olonne, Rochefort-sur mer, Saintes, la Rochelle et Niort. En Loire-Inférieure et en Vendée, il est relaté par deux journaux nantais et régionaux l’Espérance du Peuple, proche de la droite, et le Populaire, proche de la gauche. Leur version radicalement différente ajoute un peu de mordant au récit de cette visite.
Le 20 avril au soir, à Nantes, a lieu le début des festivités : à 20 h 30, retraite aux flambeaux, suivie, de 21 h à minuit d’une fête de nuit sur le cours de la République. Le lendemain, avant son arrivée, à 8 h précises, Mgr ROUARD monte à l’autel de la cathédrale Saint-Pierre pour célébrer une messe d’une demi-heure la grande nef est absolument pleine. Dans la ville, dès 7 h 30, la foule commence à se masser dans les rues et sur le parcours que doit suivre le Président. Il tombe une petite pluie fine et maussade qui menace de changer en boue infecte le sable jeté à profusion sur les pavés.
La Ville a dépensé beaucoup d’argent pour les décorations dont les travaux de réalisation ont commencé dès le 4 avril. Elles sont homogènes et consistent en une série de mâts bleus, surmontés de flammes tricolores et ornés d’un trophée de drapeaux, des guirlandes, des feuillages qui les relient les uns aux autres tandis que les arcs de triomphe sont nombreux. La sortie de la gare de l’Etat est très bien décorée avec quantité de drapeaux incolores, un arc de verdure et des panneaux décoratifs. Sur la Place de la République, est installé un hideux pylône qui doit supporter les gymnasiarques des Sociétés nantaises : aucune forme architecturale et un assemblage de couleurs criardes « à faire hurler les chiens du quartier » (l’Espérance du Peuple). Place du Commerce, le grand arc de triomphe municipal est un peu étrange, avec un côté Renaissance et l’autre égyptien, tandis que de leur côté, les horticulteurs ont élevé un arc de triomphe très élégant et de bon goût. Au château, les murs sont tapissés de panoplies d’armes anciennes entourées de drapeaux ; les deux grandes tours ont été garnies d’immenses panoplies de sabres de cavalerie rayonnant autour d’une cuirasse, le tout d’un très bel effet. La façade de l’Hôtel-Dieu est très sobre : quelques drapeaux sur des écussons aux initiales R.F. La plupart des arcs de triomphe portent en lettres énormes l’inscription : Honneur à Félix FAURE.
La Place Royale et la Rue d’Orléans sont d’un très bel effet, avec des torsades de draperies tricolores courant tout le long des balcons et des portiques de verdure dressés le Iong des trottoirs. La décoration de la Place Graslin est toute en trophées de drapeaux. La rue Crébillon a des lanternes multicolores pendues aux guirlandes de feuillages qui relient les mâts pavoisés. Les commissaires chargés du carrefour de la rue Boileau ont utilisé une corde pour y suspendre une énorme couronne fermée, c’est-à-dire une couronne royale portant les lettres R.F. « que certains ont interprété comme Royauté Française » (l’Espérance du Peuple). Mais en dehors des décorations officielles, il n’y a presque rien, seules quelques maisons de commerce sont décorées tandis que quelques drapeaux de fonctionnaires mélancoliques rappellent leur loyauté envers l’état.
A la gare de l’Etat, les troupes sont massées dans la cour : un escadron de dragons à cheval, un peloton de gendarmes, un bataillon du 65ème, au milieu l’état-major du 11ème corps et près d’eux les officiers de la réserve. Sur le trottoir intérieur de la gare s’avance un dais tendu de draperies rouges avec écussons et trophées de drapeaux tricolores. Le salon, placé dans la salle d’attente, est fermé de tentures de velours rouge avec des franges d’or, encadrant des panneaux des Gobelins et une grande carte du réseau de l’Etat. Devant une énorme glace, est installé un buste de la République émergeant de gerbes de fleurs. Sur le quai, attendent notamment l’amiral BESNARD, ministre de la Marine, l’amiral NOESNARD, préfet maritime de Lorient, des généraux, le Maire et son Conseil Municipal, des sénateurs et députés et le Président du Tribunal de Nantes.
Le train arrive à 9 h 30. M. ETIENNEZ, Maire de Nantes, s’avance pour recevoir le Président et lui dit que la population nantaise est amie du calme et du Gouvernement et ne demande qu’à vivre en paix de son travail. Devant la cour de la gare et les troupes qui s’y trouvent, le Président procède à la remise des récompenses aux employés des chemins de fer et aux décorations militaires. Une salve de 101 coups de canon est tirée, puis chacun remonte en voiture, selon son rang et sa dignité, et le cortège se met en marche vers la préfecture, marchant au petit trot entre la haie des troupes échelonnées sur son passage. A chaque endroit traversé, est localisé un corps d’armes différent. Tête nue et chapeau à la main, M. FAURE salue la foule qui répond par quelques cris de : « Vive Félix FAURE », qui sont relativement rares et clairsemés « malgré les claqueurs qui font illusion dans la foule » (l’Espérance du Peuple).
A peine le Président est-il entré dans le salon d’honneur de la préfecture que les présentations commencent dans l’ordre indiqué par le protocole. M. le Baron de LAREINTY commence par présenter le Conseil Général, puis Mgr l’évêque se présente pour prononcer quelques paroles dans lesquelles il fait appel à la protection de Dieu pour rendre la France forte et puissante. Pendant ce temps, la Municipalité a l’amabilité d’offrir à la presse étrangère et locale un excellent déjeuner dans la salle Turcana, rue de l’Arche Sèche ; au dessert, M. SALLIERES, directeur du Populaire, boit à l’union des journalistes de Paris et de province.
A cette heure du déjeuner, on se rend compte de l’important public amené à Nantes par de nombreux trains, formé de campagnards et d’habitants des gros bourgs et petites villes de la région, faciles à distinguer des citadins et qui font la joie des restaurateurs de la ville. Au dehors, une boue noire et gluante a recouvert les pavés, la pluie avant redoublé d’intensité, ce qui n’empêche pas le public nantais de comparer les décorations à celles de la Fête-Dieu.
Pendant ce temps, le préfet présente les maires et les instituteurs au Président qui fait ensuite un discours, précisant notamment que les maires doivent continuer à faire apprécier à leurs compatriotes les libertés municipales qu’ils doivent au Gouvernement de la République, car c’est la République qui leur a donné le droit de choisir un maire dans chaque commune. Il ajoute que le gouvernement de la République ne se désintéresse d’aucune ambition locale. Puis c’est le tour des instituteurs et de quelques rares institutrices. Le préfet parvient à glisser au Président, à cette occasion, que l’on ne tolère les instituteurs dans le département qu’à la condition pour eux de n’exécuter qu’imparfaitement les lois d’athéisme qu’il a votées ou revêtues de sa signature.
Le Président visite ensuite le lycée (aujourd’hui Clemenceau) où il est reçu par le recteur de l’Académie, puis traverse le jardin des Plantes et procède à l’inauguration du monument élevé à la mémoire des enfants morts pour la patrie, à l’occasion de la guerre de 1870-1871 contre la Prusse. Ce devait être le clou de la visite, et de nombreux Groupements associations, syndicats, sociétés et corporations de la ville qui compte 150 000 habitants, avaient été conviés, mais la pluie et la faiblesse de l’organisation les ont empêché de venir, notamment à cause du manque de place. A 15 h 30, le ballon « l’Espace » s’élève majestueusement au-dessus du cours Saint-André. Puis on découvre la statue, oeuvre de M. BARREAU, tandis que le Choral nantais chante l’hymne aux morts pour la patrie. Puis M. PARFAITE, président du comité à l’initiative duquel on doit la statue, fait un discours, suivi de M. le Maire, et de l’amiral BESNARD, ancien chef d’état-major de la division GOUGEARD qui a combattu contre les prussiens.
Le cortège se met ensuite en route vers l’Hôtel-Dieu, où M. FAURE est reçu par l’administration des Soeurs de la Sagesse, avant d’entrer dans l’école de Médecine reçu par M. le Dr MALHERBE. Il nomme M. le Dr HAUSTAUX chevalier de la Légion d’Honneur, puis repart à la préfecture pour se préparer au banquet qui sera donné au théâtre de la Renaissance.
La salle du festin ne laisse rien à désirer : des grandes toiles peintes en rouge avec des croix de Malte ont été tendues. Des écussons aux armes des villes bretonnes, entourés de faisceaux de drapeaux tricolores et des plantes vertes, complètent la décoration. A 19 h 30, le Président prend place parmi 650 convives. M. le Maire fait un discours, en arguant notamment que les Nantais sont prêts à accueillir toutes les réformes tendant à l’amélioration du sort de la classe ouvrière. Il a ajouté que le Canal Maritime a rendu à Nantes une partie de l’importance de son port, et qu’il reste à créer une voie navigable pour la batellerie entre Nantes et Orléans, mettant la ville en rapport direct avec les canaux dont les ramifications S’étendent jusqu’en Autriche. Ce serait là une oeuvre utile pour le commerce nantais, qui y recueillerait des frets de sortie, et en même temps une oeuvre nationale et patriotique car, le cas échéant. ce serait permettre à la France de se passer des charbons anglais si certaines complications venaient à se présenter.
Le Président lui répond que la République poursuit avec passion l’amélioration de la condition des humbles sans chercher à froisser aucun intérêt acquis, et que la création du Canal Maritime constitue un réel progrès. Il souhaite le développement commercial et industriel de la ville qui l’accueille. Vers 22 h, commence au théâtre Graslin une soirée de gala à laquelle on assiste notamment au chant de gens en costumes bretons : Aux armes citoyens. La soirée se termine à 21 h 15. Pendant ce temps, en ville, depuis 20 h, une foule compacte remplit toutes les rues pour jouir des illuminations. qui ne fonctionnent en réalité que partiellement, et assister au feu d’artifice.
Le voyage en Loire :
Le lendemain, dès 6 h, et ce malgré la pluie, une foule compacte stationne les pieds dans l’eau ou dans la boue aux abords de la Gare maritime et sur le quai de la Fosse. Comme la veille, les troupes forment la haie sur le parcours que doit suivre le cortège présidentiel, mais il n’y a presque personne car tout le monde s’est massé aux abords du navire présidentiel, « l’Elan ». A 6 h 45, les journalistes et les invités de la Chambre de Commerce arrivent sur le pont de la « Ville de Nantes ». D’autres bateaux de la Basse-Loire sont occupés par les souscripteurs du banquet. A 7 h passées, le Président défile au trot sur le Quai de la Fosse toujours stoïque, sous la pluie battante, dans sa calèche découverte. Pendant qu’on joue la Marseillaise, M. FAURE est reçu à bord de l’Elan par l’amiral BESNARD, ministre de la Marine. M. JOUCLA-PELOUX, préfet de Loire-Inférieure et les autorités maritimes et militaires entourées du personnel de la Marine en grande tenue. Le navire s’ébranle suivi du vapeur des Ponts et Chaussées. La flottille qui emporte les invités, les souscripteurs et les journalistes, viennent ensuite. Rapidement, le Ville de Nantes dépasse les autres steamers pour venir se ranger immédiatement derrière l’Elan, suivi à 80 m de distance par les autres navires. Tous ceux-ci sont pavoisés et les ovations qu’on ne ménageait pas hier pour l’armée de terre sont aujourd’hui pour la marine militaire.
Au moment des toasts, le Président de la Chambre de Commerce adresse à Félix FAURE un discours de bienvenue : il le remercie de venir présider à l’inauguration officielle du Canal Maritime latéral à la Loire. Depuis son ouverture en 1890. il a vu transiter plus de 400 navires d’un tirant d’eau supérieur à 5 m alors que précédemment le port de Nantes était complètement inaccessible aux bâtiments de cette dimension. Les améliorations entreprises et déjà partiellement effectuées dans le lit du fleuve, en amont et en aval du canal maritime, ont beaucoup aidé à ce développement. Le gouvernement est remercié d’avoir procuré avec le concours de ses ingénieurs l’appoint financier. L’amélioration de la Loire fluviale fait désormais partie d’un programme national et constituera une incitation à apporter à l’aménagement et à l’outillage du port de Nantes tous les perfectionnements.
Aux sifflements des sirènes des navires descendant la Loire se mêlent les applaudissements des habitants de Chantenay, de Trentemoult, de la Roche-Maurice et de Basse-Indre installés le long des quais, malgré l’averse continue qui donne pâle figure aux drapeaux tricolores.
Puis l’Elan vient se ranger près du ponton d’Indret fort bien décoré de drapeaux, et M. FAURE débarque sous la pluie tandis que la musique joue la Marseillaise. La société de gymnastique « l’Avant Garde » forme la haie d’honneur. Toute la population ouvrière est massée sur la promenade décorée de guirlandes, de pavillons et de lanternes vénitiennes. Cette visite avait été un moment, inespérée : le 12 avril, le Président avait déclaré au Préfet de Loire-Inférieure que, s’arrêtant à Paimboeuf, il ne descendrait vraisemblablement pas à Indret, dont il connaissait l’arsenal et l’île depuis le voyage qu’il a fait comme ministre de la Marine en 1894. Le navire présidentiel s’arrêterait. devant l’île durant quelques instants avant de poursuivre son voyage. Mais le programme final retenu le 14 avril fait état d’un arrêt à 8 h 30 prévu à Indret pour la présentation des ouvriers de l’Etablissement national.
M. BERRIER-FONTAINE, directeur, reçoit le chef d’Etat et procède aussitôt aux présentations d’usage qui ont lieu dans l’ordre suivant : M. VIOLIN, le doyen des maires du canton et peut-être du département, le conseil municipal de Basse-Indre, M. LHOMME, sous-directeur de l’Etablissement, MM. les ingénieurs de la marine BROCARD, LELONG et HAAS, M. SERRES, inspecteur-adjoint, M. CHAMOUARD, chef des détails administratifs, M. SEGUARD, médecin principal, M. COLLIN, médecin 2ème classe, M. MAUGUET, curé de la paroisse, M. BESSON, agent administratif, MM. les sous-agents administratifs DAGRIMET, HAMONEAU, GREGOIRE et FOURCHARD, M. MARC, agent comptable, et tous les agents de l’administration.
M. le Président de la République remet à M. SOUCHARD, maître principal 2ème classe, la croix de la Légion d’Honneur et lui donne l’accolade, à M. BERTREUX, chef-contremaître, la médaille d’honneur en or, et à M. GUILLEMAND, chef ouvrier, la médaille d’honneur en bronze. Puis il serre la main de ces serviteurs de l’Etat. M. le directeur de l’Etablissement adresse à M. FAURE ses compliments de bienvenue à Indret, il lui rappelle la première visite qu’il fit en 1894 et les résultats qu’Indret en a obtenus. De jeunes enfants présentent des fleurs au président qui sourit et remercie. Il visite ensuite rapidement les ateliers et adresse une allocution aux ouvriers qu’il remercie de leur attachement à la République avant de remonter sur l’Elan. Les réceptions ont été « très simples mais très cordiales » (Le Populaire).
Pendant celles-ci, le « Ville de Nantes » qui transporte les journalistes, le « Basse-Indre » et I’« Excentrique » (bateau d’Indret) ont pris de l’avance pour aller se faire écluser dans le Canal Maritime et permettre aux invités de prendre place dans la salle du banquet avant l’arrivée du chef de l’Etat, tandis que tous les autres bateaux de la flottille suivent le fleuve en direction de Saint-Nazaire.
L’Elan reprend sa route en passant devant Couëron et Le Pellerin. A Couëron, la « Lyre Couëronnaise » joue l’hymne national, tandis que le Maire et le conseil municipal ainsi que les enfants des écoles sont rangés sur le quai et que les ouvriers du port ont quitté leur travail pour saluer le Président. L’Elan passe ensuite l’écluse de la Martinière, décorée de drapeaux et de pavillons, avant d’emprunter le Canal Maritime uniformément désert. Puis, après le pont tournant également bien décoré, le bateau présidentiel aborde près du Carnet, sur la commune de Frossay, à proximité de la salle du banquet. Chaque bateau a déjà accosté au ponton qui lui est réservé. Le banquet est offert par la Chambre de Commerce de Nantes dans une très grande salle édifiée sur les bords du canal. Les initiales du Président de la République « FF » sont représentées ainsi que l’inscription « Oculi omninium in te spérant dominé » (les yeux de tous espèrent en toi Seigneur - citation tirée de la Bible). M. de LAREINTY en tant que maire de Frossay fait un discours de bienvenue, puis on sert le déjeûner, exécuté par la maison GAULT. Au sortir du banquet, M. RIVRON, Président de la Chambre de Commerce, présente M. LINYER au Président, avec lequel il s’entretient de la grave question de la Loire navigable si importante pour Nantes. Celui-ci lui répond qu’il connaît la question de longue date et qu’il s’y intéresse vivement, une commission d’études a été nommée pour l’examiner.
Après le déjeuner, la flottille repart vers l’estuaire. L’Elan arrive à l’estacade de Paimboeuf vers 13 h 15. Le Président et sa suite descendent sur le quai Sadi-Carnot par une passerelle faite ad hoc. Le Président est reçu par le Maire de Paimboeuf et M. de JUIGNE, député de l’arrondissement, puis il fait une petite promenade de 30 à 40 min sur le quai et rembarque. La visite présidentielle a duré environ 20 min. Pendant ce temps, le vapeur des journalistes a croisé devant le port et ceux-ci ont pu voir la décoration des quais, toute de drapeaux et de lanternes vénitiennes. Le « Simone » passe devant le port cinglant à toutes voiles vers Saint-Nazaire. Les autres bateaux appareillent ensuite lentement vers la sous-préfecture car la marée est extrêmement basse et le chenal peu profond.
Le Président descend à Saint-Nazaire avec la même cérémonie : réception par le maire, M. LECHAT-BOILEVE, sonneries aux champs, la Marseillaise, cris et piétinement de chevaux. L’accostage des bateaux « l’Excentrique » et « le Piston » pose problème car la marée est extrêmement basse et aucune espèce d’escalier n’existe pour permettre le débarquement. Pendant ce temps, le Président est monté en voiture et roule au grand trot vers le nouvelle entrée du port, où M. DUVAL, Président de la Chambre de Commerce, lui explique le projet de la ville qui permettra aux vaisseaux des plus forts tonnages de rentrer dans les bassins qui seront un refuge pour la flotte. Une réception à la Sous-Préfecture a ensuite lieu.
Sur la place de l’Hôtel des Postes, des habitants du Marais de Guérande présentent une pétition relative à l’industrie salicole adressée au Président du Conseil. Il est notamment indiqué qu’à la suite des dernières tempêtes, qui ont ravagé les côtes, les digues protégeant les marais ont été en partie détruites. Il est impossible aux exploitants, abandonnés à leurs seules ressources, de subvenir aux travaux de réfection si l’Etat ne vient pas à leur secours. De plus, le marais est toujours imposé, au titre des impôts, comme terrain de 1ère classe, suivant les bases du décret de 1810, alors qu’aujourd’hui il a subi une dépréciation de 80 %. D’un autre côté, les anciens débouchés du sel de l’ouest disparaissent de plus en plus.
Après quelques décorations, le Président visite les chantiers de construction. La décoration des rues nazairiennes est d’un bon effet sur le quai du vieux bassin, deux petits phares ont été dressés par l’Administration des Ponts et Chaussées. A l’entrée de la rue Villez-Martin, est installée une sorte de roche percée dont l’idée est originale mais dont l’exécution est un peu mastoque et primitive. Place Marceau, on remarque un arc de triomphe monumental, à trois portes, dressé par l’industrie nazairienne. Rue de Nantes, des arcs de triomphe de verdure, portant des mâts avec drapeaux et guirlandes de verdure.
Sur le parcours de M. FAURE, les acclamations sont aussi fournies qu’à Nantes et on entend même un peu plus de cris : Vive la République ! Après la visite de l’hospice, le cortège se rend à un banquet dressé au Nouveau Casino des Mille Colonnes, dans une grande salle bien décorée pour la circonstance. Au dessert, M. LECHAT remercie le Président de sa visite et attire son attention sur la nouvelle entrée du port puis demande le concours de l’Etat pour cette grande oeuvre dont les travaux ont déjà commencé. Le Président lui répond que le port pourra être utile, nécessaire même à la défense nationale. Dans les projets maritimes du Gouvernement, une part assez large est faite à l’industrie de Saint-Nazaire. Cela provoque des applaudissements répétés. Sitôt après le banquet, le Président repart vers le port afin de s’embarquer sur un des navires de l’escadre dont les illuminations scintillent sur la rade, tandis que de puissants projecteurs électriques inondent par instant les quais d’une vive lumière. A l’embarcadère, un canot à vapeur le conduit à l’escadre. Puis il quitte la Loire-Inférieure pour de nouvelles destinations.
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